vendredi 30 septembre 2011

Jour 1602

Nominé mais pas primé

Le Monde, 28 septembre 2011 :

"Pour tenter de respecter une de ses promesses de candidat en 2007, celle d'être "le président du pouvoir d'achat", Nicolas Sarkozy avait sorti, à la fin du printemps, sa botte secrète. Le président avait évoqué le versement d'une "prime de 1 000 euros" pour les salariés des entreprises de plus de 50 salariés dont les dividendes augmentent par rapport à la moyenne des deux années précédentes. [...] Sous réserve des surprises éventuelles qui peuvent encore surgir d'ici au 31 octobre, la mayonnaise n'a pas pris. Les entreprises, qui ont critiqué la complexité du dispositif et mis en avant leurs propres mécanismes d'intéressement, ont traîné les pieds. Les syndicats ont misé, souvent en pure perte, sur des augmentations de salaires sonnantes et trébuchantes et ne se sont pas battus pour la prime. Les négociations sur le partage de la valeur ajoutée, souhaitées par Nicolas Sarkozy, n'ont pas avancé d'un pouce. En juillet, lors d'une dix-septième... séance sur la modernisation du dialogue social, le patronat a proposé "une trame d'information-consultation" sur la création et le partage de la valeur ajoutée. L'objectif final serait de parvenir, lors de trois réunions prévues d'ici la fin de l'année (3 octobre, 8 et 16 décembre), à un "socle d'information facilitant le dialogue et la négociation dans l'entreprise". Un souci pédagogique qui laisse les syndicats de marbre. Et, de l'avis de 80% des directeurs de ressources humaines de grandes entreprises, consultés par le cabinet Deloitte, la "prime Sarkozy" aura "peu ou pas d'impact" sur le niveau des salaires. En d'autres termes, elle a, pour l'heure, fait pschitt."

jeudi 29 septembre 2011

Jour 1601

Son hobby ? Aider Bouygues à construire des prisons


"Annonçant un objectif de 80 000 places de prison à l'horizon 2017, le président de la République entraîne le pays dans une politique pénale coûteuse et contreproductive en matière de prévention de la récidive. Invoquant le nombre de peines « inexécutées », il estime que la France a besoin de 30 000 places d'emprisonnement supplémentaires pour mettre en œuvre les décisions des magistrats. Or, la plupart de ces peines sont en réalité en attente d'exécution pour être aménagées en surveillance électronique, placement extérieur ou semi-liberté, des mesures moins coûteuses et plus favorables à prévenir la récidive. Ce sont bien le manque de moyens des services de l'application des peines et des services pénitentiaires d'insertion et de probation qui empêchent l'aménagement rapide de ces courtes peines de prison. Nicolas Sarkozy souhaite revenir sur cette politique d'aménagement de peine, renforcée par sa propre majorité parlementaire lors de l'adoption de la loi pénitentiaire en novembre 2009. Il préfère aujourd'hui « ouvrir rapidement des prisons dédiées aux condamnés pour courtes peines ne présentant pas de dangerosité particulière », dont il reconnaît lui-même qu'ils représentent « la majorité des personnes incarcérées » et que « la plupart des peines en attente d'exécution sont précisément de courtes peines ». Si ces détenus ne présentent pas de « dangerosité particulière », il est permis de se demander pour quelles raisons ils doivent nécessairement purger leur peine en prison. Afin de mieux prévenir la récidive, toutes les études montrent qu'il est préférable d'exécuter ces peines en milieu ouvert qu'en milieu fermé. Les taux de récidive les plus élevés concernent les détenus qui ont purgé la totalité de leur peine en prison : 63% de récidive dans les cinq ans pour les libérés en fin de peine sans aménagement ; parallèlement, les condamnés à des peines alternatives récidivent moins (45%). Dès lors, une première étape pour limiter la récidive réside bien dans le fait d'éviter le plus possible l'emprisonnement, dans la mesure où il aggrave la situation sociale, psychique, familiale des personnes, a tendance à perpétuer les phénomènes de violence et à accroître les risques de passage à l'acte délinquant. Le Conseil de l'Europe a ainsi rappelé à plusieurs reprises que « dans la plupart des cas, la privation de liberté est loin d'être le meilleur recours pour aider l'auteur d'une infraction à devenir un membre de la société respectueux de la loi ». Le président de la République se réfère également à une prison qui n'existe pas : il évoque une prison où l'encellulement individuel serait respecté, en prétendant que sa majorité « a renforcé le respect de la dignité des détenus en inscrivant dans la loi le principe de l'encellulement individuel ». En réalité, la loi pénitentiaire s'est contentée d'en reporter une fois encore l'application à une échéance de cinq ans, soit novembre 2014. En pratique, ce sont aujourd'hui 60% des détenus qui ne disposent pas d'une cellule individuelle. Avec le développement des centres nationaux d'évaluation, Nicolas Sarkozy fait également croire que les professionnels sont en mesure d'effectuer des évaluations de la « dangerosité », ce qui n'est pas le cas en France. La Haute Autorité de Santé l'a rappelé en mai 2007, indiquant que « tout le monde s'accorde pour relever la forte subjectivité et le flou des contours » de la notion de dangerosité, « souvent ponctuelle » et qui « doit être redéfinie selon la fluctuation de l'état mental, des facteurs environnementaux, des stresseurs, des traitements utilisés »... Non seulement ce n'est pas la dangerosité qui est évaluable mais certains facteurs de risque de récidive. Et de plus, les professionnels français ne sont pas dotés d'outils d'évaluation permettant de repérer ces facteurs sur lesquels cibler l'accompagnement. Nicolas Sarkozy se garde enfin de préciser que la construction de 30 000 places de prison représente un coût de plus 3 milliards d'euros pour le contribuable. Outre la construction, le coût d'une journée de détention est évalué en moyenne à 82 euros, ce qui reviendrait avec l'incarcération visée de 80 000 personnes, à un budget de 6,5 millions d'euros par jour. A titre de comparaison, une mesure de placement extérieur représente un coût moyen de 15 euros par jour, tandis que l'exécution d'un travail d'intérêt général pendant 18 mois coûte au total 550 euros par condamné. Pour l'Observatoire international des prisons, la France n'a aucunement besoin d'accroître le parc carcéral pour mieux exécuter les peines et prévenir la récidive. Le Code pénal pose pour principe qu'« une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate » (article 132-24). En ce sens, l'urgence est au développement des moyens pour l'exécution des courtes peines en milieu ouvert et à l'amélioration de la qualité du suivi en vue d'une meilleure insertion et d'une réelle prévention de la récidive."

mercredi 28 septembre 2011

Jour 1600

Vox Populi

Le Monde, 28 septembre 2011 :

"Selon un sondage TNS-Sofres [...] 72 % des Français estiment que d'une manière générale les élus et les dirigeants politiques sont "plutôt corrompus" [...] "Ce jugement critique est le plus fort jamais mesuré depuis 1977, date à laquelle la question a été posée pour la première fois par TNS Sofres. Il est en outre en augmentation de 4 points par rapport à juillet 2010, qui était déjà un record", note l'institut."

mardi 27 septembre 2011

Jour 1599

Un intello de plus au gouvernement

Chouette, un nouveau ministre des sports... Le Monde, 27 septembre 2011 :

"La ministre des solidarités était l'invitée d'Europe 1, mardi matin. [...] Bruce Toussaint en a profité pour jouer un mauvais tour à la ministre, en lui demandant qui était l'auteur de cette phrase : "On dit que je suis misogyne, mais tous les hommes le sont, sauf les tapettes." Réponse de Mme Bachelot : "C'est vraiment quelqu'un dont je n'accepte pas les commentaires. Il arrive dans la même phrase à être sexiste et homophobe. Bon, alors, dites-moi…" Le présentateur se fait alors un plaisir de lui apprendre qu'il s'agit de David Douillet. "Eh bien, il a des progrès à faire, David. On va les lui indiquer", répond-elle alors, légèrement gênée. David Douillet a écrit cette phrase dans une autobiographie datée de 1998, L'Ame du conquérant. Elle a été ressortie il y a deux ans par Le Canard enchaîné. Interrogé sur sa "misogynie rationnelle", comme il la qualifie dans son livre, David Douillet avait expliqué, pour se défendre, que le terme de "tapette" visait seulement "les hommes qui ne s'assument pas"."

lundi 26 septembre 2011

Jour 1598

Nos amies les banques

Libération, le 26 septembre 2011 :

"La commune de Rosny-sur-Seine (Yvelines), qui a contracté des emprunts toxiques, a déposé lundi une plainte avec constitution de partie civile contre Dexia Crédit local, devant le tribunal de grande instance de Versailles, a-t-on appris de source judiciaire. Une précédente plainte avait été déposée par la commune, qui avait donné lieu à l'ouverture d'une enquête préliminaire, a précisé la source judiciaire. La plainte de la mairie de Rosny-sur-Seine vise des faits d'"escroquerie en bande organisée" et "tromperie""

dimanche 25 septembre 2011

Jours 1596 & 1597

Un enterrement de 1ère classe
 
Syndicat de la Magistrature, le 21 septembre 2011 :

"Pour tout citoyen épris de justice, le spectacle offert hier, devant la 11ème chambre du tribunal correctionnel de Paris, par les deux représentants du ministère public qui ont requis, avec une touchante application, la relaxe générale dans l’affaire dite « des chargés de mission de la ville de Paris », est affligeant. Bien sûr, la gestion de ce dossier par le parquet révèle d’abord l’immense faiblesse de son statut. Le Syndicat de la magistrature l’a maintes fois dénoncé : tel qu’il est aujourd’hui conçu, le ministère public est tout entier dans la main du pouvoir exécutif, et ce vice originel se manifeste avant tout dans les affaires dites « sensibles ». La réforme de ce statut est devenue un enjeu démocratique de premier ordre, enjeu que le pouvoir actuel, empêtré dans les affaires, feint opportunément d’ignorer. Cette gestion calamiteuse traduit aussi la perte coupable de tout repère éthique de la part d’une certaine hiérarchie. Philippe Courroye à Nanterre et Jean-Claude Marin à Paris ne se sont pas ménagés pour tenter d’épargner à Jacques Chirac le procès qui s’achève. Plus généralement, M. Marin s’est illustré à la tête du parquet de Paris par son souci constant de traiter les dossiers gênants au mieux des intérêts du pouvoir. C’est une bien longue liste que celle des services qu’il a rendus, allant jusqu’à s’humilier dans l’affaire « Clearstream » en changeant d’avis en même temps que de gouvernement – gouvernement qui vient de le promouvoir à la Cour de cassation, autant pour le remercier que pour pouvoir continuer à compter sur lui dans l’affaire « Lagarde ». Servir sous l’autorité d’un tel magistrat n’habitue certes pas au courage ; la responsabilité particulière de ceux qui se sont exprimés hier au nom de la société ne saurait, pour autant, trouver d’absolution dans ce triste constat. Ils ont, tout d’abord, par leur lecture manifestement partisane du dossier, contribué à ternir encore l’image d’une institution, le parquet, qui n’en avait pas besoin et qui, d’ailleurs, dans sa majorité, ne ressemble pas à la caricature qui s’est donnée hier en – piètre – spectacle. Ils ont ensuite, par leur expression visiblement peu maîtrisée, manqué de la plus élémentaire des délicatesses envers les magistrats qui ont instruit les deux volets du dossier – magistrats dont la compétence, l’indépendance et la rigueur sont pourtant unanimement reconnues. Au-delà même des railleries – parfaitement justifiées – de la totalité de la presse, qui rejaillissent sur l’institution judiciaire tout entière, ces deux procureurs seront parvenus à renforcer les citoyens dans leur conviction que la justice n’est décidément pas la même pour tous ; en ce sens, c’est une part du sentiment démocratique qui s’est trouvée, hier, encore un peu plus abîmée. Fidèle à un positionnement aussi éloigné que possible du corporatisme, le Syndicat de la magistrature ne saurait cautionner, ne fût-ce que par le silence, un tel dévoiement de la justice."

vendredi 23 septembre 2011

Jour 1595

Frais de bouche

Libération, le 23 septembre :

"80.000 «grands électeurs» (conseillers régionaux, généraux et les maires ou conseillers municipaux) se déplaceront dimanche pour les élections sénatoriales. Un vote obligatoire, sous peine d'une amende de 100 euros, mais également rémunéré, ou plutôt défrayé. Richard Bertrand, conseiller municipal Modem à Poissy raconte ainsi avoir «reçu un dossier complet accompagné d'un "état de frais et indemnités" proposant de lui rembourser un forfait de 15,25 euros [pour le repas lié au déplacement, ndlr] ainsi qu'une participation à ses frais de transport». Soit d'après lui environ 15 euros supplémentaires. Et le président des centristes des Yvelines de s'étonner d'une telle situation: «Dans une période où l’Etat cherche à faire des économies en mettant en place un plan de rigueur, nous, élus de la République, devons montrer l’exemple». Il invite donc «chaque grand électeur» à «refuser cette indemnité», ce qui permettrait d'économiser d'après lui «50.000 euros rien que sur le département des Yvelines»."

jeudi 22 septembre 2011

Jour 1594

Au secours, c'est la police

Libération, le 22 septembre 2011 :

"A Marseille, l'inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie par le parquet après le décès à l'hôpital d'une personne autiste de 48 ans, victime d'une crise cardiaque pendant que des policiers le maîtrisaient de façon musclée. Il était en crise. Une crise muette. Ils ne le savaient pas... Les policiers avaient été appelés mardi après-midi par une voisine de cet homme. Elle le connaissait, ils communiquaient parfois, mais là il était agtressif et mutique dans le hall, cassait des vitres. Un chef d'équipe et deux policières, dont une adjointe de sécurité, sont arrivés, lui ont demandé de les suivre. Très costaud, l'homme n'a pas répondu, se serait "rué" selon le parquet sur les policiers", qui ne savaient pas qu'il souffrait de troubles mentaux. "Il se débattait très violemment, au point que deux fonctionnaires ont été blessés, l'un à la main, l'autre à la cheville, en tentant de le maîtriser et de l'entraver au sol", expliquait ce matin Jacques Dallest, procureur de Marseille, à l'Agence France presse. Le quadragénaire a fini par faire un arrêt cardio-vasculaire. Hospitalisé et placé en réanimation, il est décédé mercredi."

L'entrainement de nos policiers est toujours aussi calamiteux, avec les résultats que l'on voit ici...

mercredi 21 septembre 2011

Jour 1593

Résumé des épisodes précédents

Le Secrétaire général du Syndicat de la magistrature , dans Libération, le 21 septembre 2011 :

"Le 12 décembre 2003, celui qui n’était alors «que» ministre de l’Intérieur déclarait aux futurs juges et procureurs de l’Ecole nationale de la magistrature : «Je ne suis pas garde des Sceaux, mais il y aurait des choses à faire dans ce secteur. Ne le répétez pas, on me prêterait des ambitions que je n’ai pas .» La suite a confirmé qu’il en avait un peu plus, mais cette série d’antiphrases prononcées en ces lieux éclaire rétrospectivement la domination que l’actuel chef de l’Etat a choisi d’asseoir sur l’institution judiciaire. On aurait tort, cependant, d’y voir seulement l’empreinte d’un ressentiment personnel. Trop souvent, les poncifs de la psychologie spontanée altèrent l’analyse des relations entre le pouvoir politique et l’autorité judiciaire. Ainsi, lorsque celle-ci résiste aux tentatives de délégitimation et de domestication émanant de celui-là, il ne peut s’agir que d’une «grogne» ou d’un «mouvement d’humeur», déshistoricisé et dépolitisé, comme le traitement de «l’affaire de Pornic» l’a récemment illustré. Un double reproche contradictoire est alors adressé aux magistrats : ils font de la politique (au sens péjoratif de «politique politicienne») ; ils sont «corporatistes» (fausse analyse, vraie insulte qui sert désormais à discréditer a priori toute contestation émanant d’un secteur professionnel). On perd ainsi de vue la triple dimension sociale de la justice qui est à la fois un service, une institution et un régulateur. Rechercher ce qui est vraiment en jeu exige de défaire une série d’écrans : le juge cache le judiciaire qui cache la justice elle-même, comme la personne de Nicolas Sarkozy tend à occulter le contenu du pouvoir qu’il exerce. La mise en scène du conflit entre «les juges»- «petits» ou «rouges», c’est selon - et leur pourfendeur officiel fait oublier que c’est bien de la justice qu’il est question, c’est-à-dire d’un pan entier de la société et de son gouvernement. Or, en quelques années, la justice a enregistré des régressions majeures qui en disent long sur la situation générale. Le service public judiciaire est ainsi passé de la pénurie à l’asphyxie. Les juridictions ont subi une baisse drastique des crédits affectés à la rémunération des greffiers, assistants de justice, interprètes, experts, enquêteurs sociaux… Parallèlement, les départs à la retraite ont cessé d’être compensés et de nombreux tribunaux et services ont été rayés de la carte. Cette fameuse question des «moyens», lassante à force de devoir être posée, est souvent dépouillée de sa dimension idéologique. Il s’agit pourtant de l’application à la justice des préceptes libéraux du «New Public Management», qui porte depuis 2007 le doux nom de «Révision générale des politiques publiques». Les conséquences en sont multiples : allongement des délais de jugement, explosion de la durée des audiences, peines exécutées tardivement, réduction de l’aide aux victimes, mesures socio-éducatives ineffectives… Simultanément, la loi et les pratiques ont été remodelées par l’idéologie gestionnaire, au mépris de la qualité de la justice rendue : expansion des procédures sans audience ou «à juge unique», banalisation de la «visioconférence», primes de rendement, formatage de la formation, obsession des statistiques, etc. Par ailleurs, les assauts contre l’indépendance de la justice ont atteint un niveau inégalé sous la Ve République. Les pressions - hélas classiques - se sont intensifiées et diversifiées. Trois leviers ont été actionnés : le dénigrement permanent, le resserrement du lien hiérarchique et la contrainte par la loi elle-même. On ne compte plus les sorties de responsables politiques, chef de l’Etat en tête, conspuant telle ou telle décision judiciaire en violation de la séparation des pouvoirs. La ritournelle est connue : il n’y a pas de justice, vive le gouvernement ! On ne peut davantage énumérer les diverses manifestations de la reprise en main des parquets, qu’il s’agisse de contrôler la carrière des procureurs ou de piloter les affaires sensibles. Mais le plus simple est encore de ligoter les magistrats avec des textes (ex : la loi sur les «peines planchers»). Ici, un procureur peut afficher sa totale soumission à l’exécutif ; là, un juge paie son insoumission à l’emprise policière ; ailleurs, la hiérarchie choisit ses magistrats dans des dossiers «signalés» ; partout, l’indépendance de la magistrature - donc de la justice rendue - est menacée. Fait notable : on savait le parquet particulièrement exposé ; on découvre - ou l’on finit par s’avouer - que le siège l’est (presque) autant. Enfin, c’est la fonction même de la justice qui se trouve dénaturée. Non seulement sa composante pénale tend à devenir hégémonique, mais elle s’est muée en usine répressive au service du pouvoir. Là encore, le mélange discours + lois + pratiques a fait des ravages : dévoiement de la comparution immédiate, banalisation de la détention provisoire, déspécialisation de la justice des mineurs, extension des procédures d’exception… On aurait tort, cependant, de conclure au renforcement général de l’Etat pénal : si les pauvres, les jeunes, les étrangers et les militants ont de plus en plus de soucis à se faire, les puissants en ont de moins en moins ! La justice offre ainsi un condensé de politique libérale-autoritaire combinant casse des services publics, concentration des pouvoirs, recul différencié des droits et libertés. Ce mode de gouvernement est aussi une stratégie personnelle : Nicolas Sarkozy a bien compris les profits qu’il pouvait en tirer ; il a fondé son ascension sur le terrain de la «sécurité», se présentant comme l’homme providentiel après le «21 avril». Depuis 2007, il revendique une légitimité sans partage, enfermant la démocratie dans les limites commodes du suffrage. Les magistrats, entre autres, n’auraient rien à dire, parce qu’ils ne seraient pas investis par le «peuple français» au nom duquel ils rendent leurs décisions, et parce qu’ils seraient par essence condamnés au silence. Reste que c’est bien le peuple qui fait les frais de cette politique et que les magistrats ont le devoir de vendre la mèche de leur instrumentalisation."

mardi 20 septembre 2011

Jour 1592

Une certaine idée de la justice 
 
Le Monde, 19 septembre 2011 : 

"Farida Sou, 43 ans, dont le visa était expiré depuis plus de six mois et qui demeurait à Bastia, a été placée en rétention administrative le 15 septembre après s'être vu notifier une obligation de quitter le territoire français le même jour, selon la préfecture de Haute-Corse. En début de semaine dernière, elle était allée porter plainte au commissariat de police contre son conjoint pour 'violences conjugales'. Les policiers avaient alors découvert qu'elle était en situation irrégulière et l'avaient d'abord placée en garde à vue."

lundi 19 septembre 2011

Jour 1591

L'éducation est à poil

Manifeste contre le dépouillement de l'école :

"Nous, collectif contre le dépouillement de l’école, déclarons que les « réformes » appliquées à l’Éducation nationale n’ont de réforme que le nom, et qu’elles masquent en réalité, le plus insupportable, le plus dangereux des dépouillements. Aujourd’hui, selon une logique comptable et technocratique à courte vue, les fondements de l’école républicaine sont menacés, et l’idéal d’une éducation de qualité pour tous sapé à la base. Nous proclamons aujourd’hui que « l’école est nue ». Nue non seulement parce qu’elle est privée de moyens financiers, mais aussi et surtout parce qu’elle est amputée progressivement de son sens, expurgée de la visée humaniste qui, depuis les Grecs, lui donne son nom d’« école ». L’école est dépouillée quand le gouvernement tarit les concours de recrutement de professeurs, quand il n’assure plus la relève des enseignants retraités, ni les remplacements de professeurs malades ou en congé, et qu’il fait appel à des « viviers de vacataires » non formés et corvéables à merci. L’école est abandonnée, quand l’État se décharge de son financement sur les collectivités locales, supprime la carte scolaire et impose l’« autonomie des établissements », instaurant de telles inégalités entre académies, filières et élèves, qu’il bafoue ses principes républicains. L’école est dégarnie, quand elle est vidée de sa présence humaine (surveillants, conseillers d’orientation-psychologues, médecins et infirmiers scolaires, assistants sociaux, assistants pédagogiques…), remplacés par des caméras de surveillance et autres portiques de sécurité. Les professeurs sont démunis, placés devant des élèves sans formation pratique sérieuse quand ils débutent ; obligés, au détriment de la qualité de leurs cours, d’assumer des tâches de plus en plus nombreuses ; sommés, dans certaines filières « réformées », de se convertir à des disciplines qu’ils ne maîtrisent pas en l’espace de quelques semaines ; travaillant souvent sans manuel scolaire et sans savoir à quel examen ils préparent les élèves, car les nouveaux programmes sont appliqués dans la précipitation ; contraints de bricoler, de s’agiter, de faire semblant, de s’adapter à tout et surtout à n’importe quoi sous couvert d’innovation pédagogique. Les professeurs sont destitués, désormais recrutés, selon leur conformité idéologique au modèle du « fonctionnaire responsable » davantage que pour leur maîtrise d’un savoir ; bientôt réduits à des employés lambda, privés de l’essentiel de leur liberté pédagogique, soumis à une concurrence absurde ; obligés pour mendier des moyens de vendre leurs « projets » comme une soupe, et de se battre contre d’autres professeurs pour conserver leurs heures de cours ou leur poste. Les élèves sont spoliés, parqués à 35 ou 40 dans les classes, livrés à la loi des « flux », broyés dans la masse ; privés de centaines d’heures de cours dans les différentes disciplines, au profit d’activités-gadgets ; privés de dispositifs efficaces de soutien ; leurs familles rendues responsables de leur échec via des « contrats de réussite » ou des « stages d’été » inadaptés. Les élèves sont appauvris parce qu’on leur refuse d’apprendre le latin et le grec, les langues dites « rares » (c’est-à-dire toutes hormis l’anglais), les arts et ce qui n’est pas « rentable » ; parce que les nouveaux programmes leur proposent de l’anglais sans Shakespeare, de l’histoire sans passé, du français sans grammaire, des mathématiques sans démonstration – toujours moins de culture, et plus de procédures. Les élèves sont dépecés, eux que l’on doit calibrer avec des « items » selon les nouvelles « grilles de compétences », comme si l’intelligence humaine pouvait se découper en tranches ; eux à qui l’on doit inculquer un « socle commun de connaissances et de compétences » davantage fondé sur l’idéal de l’O.C.D.E que sur celui de Montaigne. Aujourd’hui nous appelons tous les « dépouillés » de l’Éducation nationale à nous rejoindre. Professeurs, parents, élèves, citoyens, il est encore temps d’inverser le cours délétère des pseudo-« réformes » qui transforment l’école en garderie sociale et transfèrent ses missions vers le secteur privé, au profit des plus riches et des mieux informés. Il suffit d’une volonté politique, celle de démocratiser le savoir, jadis portée par un Condorcet, un Jules Ferry, ou le comité national de la Résistance (qui a produit la commission Langevin-Wallon). Nous en appelons aux responsables politiques français, pour qu’ils agissent résolument contre le dépouillement de l’Éducation nationale."

dimanche 18 septembre 2011

Jours 1589 & 1590

C'est déjà ça...

Le Figaro, 15 septembre 2011 :

"Brice Hortefeux a été relaxé jeudi par la cour d'appel de Paris. Un verdict conforme aux recommandations émises en juin dernier par le ministère public. Toutefois, selon l'agence Reuters citée par le site Internet du Point , la cour a retenu que, sur le fond, les propos sont «méprisants et outrageants» et témoignent d'un «manque évident de culture»."

vendredi 16 septembre 2011

Jour 1588

La police parle...

Bug Brother, le 15 septembre 2011 :

"Pour comprendre ce qui suit, il faut savoir ce que sont les infractions relevées par l'action des services (IRAS), "un outil statistique utilisé depuis une dizaine d'années pour faire gonfler les bons résultats de la lutte contre la délinquance, souvent qualifiées de «délit sans victime», car sans plaignant", selon Christian Mouhanna, chercheur au CNRS spécialisé dans les questions policières : Les catégories "stupéfiants" et "étrangers" regroupent plus de trois quarts des délits classés IRAS. Or, avec les IRAS, les taux d'élucidation sont généralement de 100 % puisque, comme le rappelait un article du Figaro d'août 2009, « le délinquant est ici appréhendé en même temps que l'agent constate l'infraction ». Utile, en effet, pour muscler les statistiques. [...] Le brigadier-chef rétorquant que "cette logique des IRAS pousse les gens à bout", son commandant reconnaît effectivement que "ça pousse les effectifs de police à faire n'importe quoi" : « J'en suis le premier conscient. Je ne suis pas fier quand je vois qu'on ramène ici (au commissariat - NDLR) des gens avec un cutter et quand on gratte un peu, bah, en fait, c'est un ouvrier qui rentre de son chantier et qu'il a gardé le cutter dans le bleu du pantalon. Je ne suis pas fier de ça. Je ne suis pas fier non plus quand on va ramasser des IRAS, des ILE ("infractions à la législation sur les étrangers", des sans-papiers, en somme - NDLR) à la pelle à la gare, pourquoi ? Alors, certes, ils sont en séjour irrégulier ces gens-là. Mais c'est pas eux qui emmerdent le monde ! C'est pas eux qui causent des troubles à l'ordre public ! C'est des gens qui vont sur un chantier ou qui reviennent d'un chantier ! Ils bossent ! Ils bossent pour faire vivre leur famille ! Et nous, on va les faire chier ! On les emmène ici, on les fout en garde à vue et, avec un peu de malchance, pour eux, on les emmène au CRA (centre de rétention administrative - NDLR) et ils sont expulsés. Je ne suis pas fier. Et pendant qu'on fait ça, effectivement, pendant qu'on arrête les ILE et les ports d'armes à dix balles, on ne fait pas autre chose. Et on n'occupe pas la voie publique pour lutter plus efficacement contre les cambriolages. Et Dieu sait si ça a augmenté en 2011, ici, les vols de véhicules, les dégradations et tout ça. Mais qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse ? Si je ne suis pas d'accord, comme dit l'autre, je m'en vais ! Je vais faire autre chose ! »"

jeudi 15 septembre 2011

Jour 1587

Toujours un train de retard à l'UMP

Le Monde, 15 septembre 2011 : 

"L'UMP a dénoncé, jeudi 15 septembre, "l'irresponsabilité" de Martine Aubry, candidate à l'investiture PS pour la présidentielle, qui vient de se prononcer pour la dépénalisation du cannabis après s'y être opposée au mois de juin. [...] "Drôle de programme pour celle qui, il y a quelques jours à Marseille, se décrivait en future présidente de la sécurité. Dépénaliser le cannabis reviendrait à donner un blanc-seing à tous les trafics et à faire de l'Etat le complice des réseaux mafieux et des narcotrafiquants internationaux", a ajouté le député des Alpes-Maritimes. M. Ciotti "

mercredi 14 septembre 2011

Jour 1586

Ce n'est pas brillant

Le Monde, 14 septembre 2011 :

"Bien que qualifié de non nucléaire – comme le disait déjà la présidente d'Areva à propos de Fukushima –, l'accident de Marcoule illustre une fois de plus les dangers liés à cette énergie. Cette fois-ci, c'est le plus ancien centre industriel nucléaire de notre pays qui est atteint. Et demain? La France possède une tradition nucléaire bien établie, avec 58 réacteurs, soit près d'un réacteur par million d'habitants, ce qui en fait le pays le plus nucléarisé au monde. Cette tradition tourne à l'obstination, voire à l'idéologie. [...] La première constante est l'absence de débat public, tant sur la décision d'implantation d'une centrale que sur les grands choix de la politique nucléaire. Nul texte (pas plus la loi de 2006, aujourd'hui, que le décret de 1963, hier) ne requiert de déclaration d'utilité publique pour la création d'une centrale nucléaire ou d'un centre de stockage de déchets radioactifs. [...] Par comparaison, on peut remarquer que plusieurs pays ont, au contraire, recouru au législateur ou à des consultations populaires pour décider de leur avenir énergétique. Les renoncements au nucléaire se multiplient: Autriche, Suisse, Allemagne, Italie. D'autres pays décident de ne pas remplacer les réacteurs en fin de vie (Espagne, Suède). La deuxième constante de la politique nucléaire de la France, c'est le secret. La liste de ces secrets est longue, qu'il s'agisse, bien sûr, du nucléaire militaire, mais aussi des transports de matières radioactives et, surtout, des incidents de sites (Saint-Laurent, le Blayais, la Hague, Tricastin, Paluel, etc.). Les dangers atomiques, ainsi occultés par le secret, le sont aussi par la publication de statistiques rassurantes sur la très faible probabilité supposée d'un accident nucléaire majeur. Mais la réalité contredit ces probabilités. Les trois accidents de Three Mile Island (1979), Tchernobyl (1986) et enfin Fukushima (2011) sont intervenus en une trentaine d'années. Soit en moyenne un accident majeur tous les dix ans. [...] Nous sommes donc devenus dix fois plus dépendants du nucléaire. Et dix fois moins libres d'en sortir… Cette croissance s'accompagne d'une augmentation de notre dépendance. Il y a belle lurette que les mines d'uranium du sol français sont épuisées (depuis 1990) et que nous dépendons d'un approvisionnement étranger, avec toutes les contraintes, incertitudes et risques de conflits que cette situation comporte pour l'avenir. La deuxième évolution est un processus continu et croissant de privatisation. Certes, EDF et Areva sont deux sociétés – encore – détenues par une majorité de capitaux publics, mais les nombreux sous-traitants auxquels elles recourent sont, eux, privés et emploient souvent des personnels intérimaires chargés de la décontamination et de la maintenance des sites. Des intérimaires qu'il suffit de changer quand ils tombent malades… Ces personnels connaissent une forte rotation et sont devenus les "nomades" du nucléaire. Une rotation qui risque d'ouvrir la voie à la répétition de ce que Nils Diaz, président de la commission de réglementation nucléaire américaine, rappelait en 2004 à propos de l'accident de Three Mile Island: "Quelqu'un aurait dû le faire. N'importe qui aurait pu le faire. Tout le monde pensait que quelqu'un d'autre le ferait. Finalement, personne ne l'a fait… [...] Si les Français veulent à leur tour sortir du nucléaire, sans perdre davantage de temps, il leur reste à se convaincre que le nucléaire comporte une constante et une évolution: il est toujours aussi dangereux, et il est devenu une source d'énergie ringarde."

mardi 13 septembre 2011

Jour 1585

Bon appétit les petits chômeurs

Le Monde, 13 septembre 2011 : 

""La cantine scolaire est réservée en priorité aux enfants de la commune dont les deux parents travaillent." La phrase se retrouve dans nombre de réglements d'établissements d'enseignement. Seulement, restreindre l'accès des enfants à ce service en fonction de l'activité professionnelle de leurs parents ou de leur commune de résidence constitue une discrimination aux yeux de la loi. Et ces décisions municipales sont régulièrement retoquées par les tribunaux administratifs en vertu du principe d'égalité devant le service public."

lundi 12 septembre 2011

Jour 1584

Une Santé fragile

Libération, le 12 septembre 2011 :

"En fin de semaine dernière, dans le cadre du plan de rigueur, le Parlement a voté la hausse de la taxation des complémentaires santé. La taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) qui touche aujourd’hui la quasi-totalité des contrats proposés par les mutuelles et les assureurs privés, va passer de 3,5 à 7%. [...] Le collectif interassociatif sur la santé (Ciss), qui regroupe une trentaine d’associations intervenant dans le champ de la santé, s’inquiète des effets sur l’accès aux soins. «En moyenne, une bonne mutuelle coûte 80 euros par mois. Et dans les 110 euros pour un couple avec enfants. Si les prix augmentent encore, beaucoup de ménages ne pourront plus se payer une couverture maladie ou choisiront une protection plus faible», avertit le président Christian Saout. Or, avec le désengagement de l’Assurance maladie, les mutuelles remboursent désormais plus de la moitié des soins de ville (dentiste, opticien…) A défaut de pouvoir se payer une bonne complémentaire, les malades ont tendance à retarder, ou même renoncer, à l’accès aux soins. «Des comportements très onéreux pour la collectivité quand ils ne trouvent d’autre solution que de recourir aux urgences hospitalière», développe Christian Saout dans une tribune publiée dans Le Monde."

dimanche 11 septembre 2011

Jours 1582 & 1583

A qui profite le crime ?  

Le Monde, 9 septembre 2011 :

"Souvenez-vous. Il fut un temps où aucun militaire ne patrouillait, Famas en bandoulière, sur le parvis de Notre-Dame de Paris, un temps où vos e-mails avaient peu de risques d'être interceptés, où votre mine déconfite sur le trajet du bureau n'était pas immortalisée chaque jour par des dizaines de caméras, une époque révolue où embarquer un flacon de shampoing à bord d'un avion était encore un geste anodin... C'était avant le 11 Septembre 2001. [...] Des soldats patrouillant en rangers, l'arme au poing, dans les gares, les aéroports et les lieux touristiques. L'image est devenue banale. Elle est l'une des conséquences les plus visibles de la lutte contre le terrorisme, incarnée par le plan Vigipirate. [...] ce plan est entièrement repensé au lendemain du 11 septembre 2001 et sera maintenu en "niveau rouge" de façon continue à partir des attentats de Londres en 2005. La dernière version du plan, en vigueur depuis janvier 2007, est fondée sur un postulat clair : "la menace terroriste doit désormais être considérée comme permanente". [...] En 2009, le "pays des droits de l'homme" a procédé à pas moins de 514 813 demandes d'accès aux "logs" (qui a téléphoné ou envoyé un mail à qui, quand, d'où, pendant combien de temps ?) conservées par les opérateurs de téléphonie fixe ou mobile, et les fournisseurs d'accès à Internet (FAI). La surveillance des télécommunications est encadrée au niveau communautaire. Mais à titre de comparaison, le pays le plus peuplé de l'UE, l'Allemagne, n'en a réalisé que 12 684, soit 42 fois moins que la France. [...] En raison de son caractère exceptionnel, la mesure était censée durer jusqu'au 31 décembre 2003, avant d'être éventuellement prolongée après un rapport d'évaluation. Mais un amendement déposé par Christian Estrosi au projet de Loi sur la sécurité intérieure (LSI), le 21 janvier 2003, la rendra définitive. Censée prévenir les menaces d'attentats, la surveillance des internautes est aujourd'hui totalement séparée de l'existence ou non d'une menace terroriste. [...] Un pas de plus est franchi en 2006 : la loi relative à la lutte contre le terrorisme (LCT) présentée par le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, élargit l'obligation de conservation des "données de trafic" aux cybercafés. Elle permet en outre aux services antiterroristes de pouvoir y accéder en dehors de tout contrôle de l'autorité judiciaire, après avis d'une personnalité qualifiée "placée auprès du ministre de l'intérieur". La surveillance d'Internet échappe désormais à toute procédure judiciaire pour se placer sous le contrôle direct de l'Etat. [...] Après les attentats du 11-Septembre, l'administration Bush exige des compagnies européennes qu'elles lui transmettent les données personnelles de leurs passagers en partance vers les Etats-Unis. En cas de refus, ces dernières se verraient interdire d'atterrissage sur le territoire américain. Bruxelles négocie aussitôt un accord, que la cour de justice européenne s'empresse de juger illégal. Le superviseur européen pour la protection des données fait lui aussi part de ses "doutes sérieux quant à [sa] compatibilité avec les droits fondamentaux" en vigueur en Europe. Ces fichiers, dits PNR (Personal Name Record), seront pourtant diffusables à toutes les agences associées au Département de la sécurité intérieure, comme la CIA et le FBI, qui pourront les conserver pendant quinze ans. Les données en question peuvent comprendre : votre nom, votre adresse, votre numéro de carte de crédit, ainsi que vos habitudes alimentaires... [...] "Le problème, c'est que toutes ces procédures dérogatoires introduites au nom de l'antiterrorisme ont fini par devenir la norme, souligne Christophe André, l'auteur de Droit pénal spécial. Puisqu'elles se révèlent efficaces contre ce monstre qu'est le terrorisme, elles sont donc employées pour combattre d'autres monstres et ont fini par contaminer l'ensemble du droit pénal". "

vendredi 9 septembre 2011

Jour 1581

Chantage light Libération, le 9 septembre : 

"Après les défenseurs des parcs à thème et de la France des propriétaires, voici un troisième lobby, et non des moindres, qui se lance très frontalement dans la bataille contre le plan de rigueur. Devant le tollé provoqué par l’annonce de la suspension d’un investissement de 17 millions d’euros prévu dans son usine de Pennes-Mirabeau (Bouches-du-Rhône), l’américain Coca-Cola est finalement revenu hier soir sur une décision catastrophique pour son image. Son président pour l’Europe, Hubert Patricot, a évoqué une «erreur de communication» et affirmé que Coca continuerait à «investir en France». La «protestation symbolique» visait «une taxe qui sanctionne notre entreprise et stigmatise nos produits», expliquait-on en début de journée chez Coca-Cola. L’investissement n’était alors «pas annulé, mais réévalué dans le contexte d’incertitude créé par la taxe». Le numéro 1 mondial des sodas espérait ainsi influer sur le sort d’une mesure qui doit encore être discutée à l’automne au Parlement. Un chantage à l’investissement à peine voilé…"

jeudi 8 septembre 2011

Jour 1580

Une justice moins chère

Syndicat de la Magistrature, le 7 septembre :

"Monsieur le garde des Sceaux, La remise en liberté, hier après-midi à Nancy, d’une personne détenue qui n’avait pas été extraite de la maison d’arrêt faute de personnels pénitentiaires dédiés à cette tâche en nombre suffisant, illustre la gestion calamiteuse par votre ministère d’une réforme bâclée. Le 30 septembre 2010 en effet, un arbitrage interministériel avait consacré le transfert du ministère de l’Intérieur à celui de la Justice des extractions judiciaires. Deux régions, l’Auvergne et la Lorraine, avaient été choisies comme lieux d’expérimentation à compter du 1er septembre 2011. Dès le 25 mai dernier, nous vous avons écrit pour vous alerter sur les conséquences dramatiques qui allaient immanquablement découler des conditions dans lesquelles le transfert de charges s’organisait : seuls 800 agents étaient prévus à l’échéance de 2013 alors que la Cour des comptes estimait que 2000 agents étaient nécessaires à l’exécution de ces missions. Il était alors évident que la phase d’expérimentation ne pouvait que se dérouler de la pire des façons : absence de personnels pénitentiaires pour assurer les transfèrements, annulations d’actes judiciaires, retards dans l’exécution des réquisitions, ainsi que leurs conséquences procédurales telles que la remise en liberté que nous avons connue hier. Sur ce dossier, vous n’avez jamais fait mystère de votre impuissance. Recevant le Syndicat de la magistrature le 16 juin dernier, vous affirmiez déjà être conscient que « ça n’allait pas marcher » mais vous vous contentiez d’annoncer que le dossier allait être « réétudié ». Nous sommes aujourd’hui au regret de constater que votre incapacité à mettre en œuvre cette réforme a commencé à produire les conséquences désastreuses que nous annoncions naguère. Il est inévitable que, dans les jours qui viennent, de nouveaux transfèrements ne puissent être exécutés par l’administration pénitentiaire, faute de moyens, avec les conséquences que vous pouvez déjà constater. Nous souhaitons donc, une nouvelle fois, vous interpeller solennellement sur l’irresponsabilité manifestée par le pouvoir exécutif auquel vous appartenez qui, en privant la justice du minimum de moyens lui permettant de fonctionner décemment, prend le risque évident de voir se multiplier des dysfonctionnements tels que celui qui s’est produit hier. Compte tenu du temps dont vous-même et votre prédécesseur aviez bénéficié pour préparer ce transfert de charges, nous considérons, quant à nous, que votre responsabilité est clairement engagée : nous ne pouvons nous résoudre à ce que les politiques publiques que vous conduisez fassent empirer encore une situation que l’asphyxie budgétaire obérait déjà gravement et qui aboutit à dégrader encore l’image de la justice. Nous vous demandons en conséquence d’intervenir avec force pour obtenir au sein du gouvernement les arbitrages budgétaires nécessaires à un déblocage rapide de cette situation extrêmement préoccupante."

mercredi 7 septembre 2011

Jour 1579

L'appétit des politiques  

Le Figaro, le 7 septembre 2011 :

"Robert Navarro reste la cible principale des sages mis en place à la demande des instances nationales socialistes. Il est notamment reproché à l'ancien secrétaire fédéral une impressionnante série de facturations de pizzas pour plus de 40.000 € en moins de trois ans. La totalité de ces frais de bouche a été facturée par le restaurant Les Hockeyeurs, une pizzeria proche du siège départemental du PS à Montpellier et dont le patron est aussi un ami de Robert Navarro."

mardi 6 septembre 2011

Jour 1578

En cours

lundi 5 septembre 2011

Jour 1577

En cours

dimanche 4 septembre 2011

Jours 1575 & 1576

Bon petit soldat de l'OTAN

Défense en ligne, le 1er septembre :

"On vient de s’en aperçevoir, sur les décombres encore fumants de la « victoire » en Libye … Cette guerre a fait une victime collatérale, parmi d’autres : l’Europe de la défense. Le président français Nicolas Sarkozy, plus va-t-en-guerre que jamais (il menace désormais l’Iran de frappes préventives, dans le style de l’ex-président George W. Bush !), a prononcé lui-même l’hommage funèbre, à l’ouverture de la 19ème Conférence des ambassadeurs, avant de présider à Paris avec le premier ministre britannique, M. David Cameron, la Conférence internationale de soutien à la Libye nouvelle : « Pour la première fois depuis 1949, s’est-il félicité, l’OTAN s’est mise au service d’une coalition emmenée par deux pays européens déterminés. » Les deux « pays déterminés » sont le Royaume Uni et bien sûr la France, dont l’entente est d’autant plus cordiale qu’ils sont pilotés actuellement par deux gouvernements conservateurs"

vendredi 2 septembre 2011

Jour 1574

Rentre Avec Tes Policiers

Le Monde, 1er septembre 2011 :

"C'est une évacuation d'un camp de Roms qui nourrit la polémique. Vers 6 h 30, ce mercredi 31 août, des CRS débarquent dans le campement de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), près de l'hôpital Delafontaine, où sont installés 150 Bulgares et Roumains. Munis de gaz lacrymogènes, selon les associations, les forces de l'ordre détruisent les baraques et font sortir les familles. Motif : le tribunal de grande instance de Bobigny a délivré, le 18 juillet, une ordonnance d'expulsion de ce terrain, qui appartient à l'Etat. [...] Mais la situation devient plus exceptionnelle lorsque les CRS forcent une centaine de Roms à se rendre à la station Cosmonautes toute proche, sur la ligne 1 du tramway. Par groupes de cinq ou dix, la police les fait entrer dans les rames, avec des bagages, des vélos et des caddies, aux côtés d'autres usagers. Direction la gare RER de Noisy-le-Sec, toujours en Seine-Saint-Denis. [...] Le personnel de la régie des transports parisiens et les forces de l'ordre décident alors, d'un commun accord, d'affréter une rame spécialement pour les familles, en dehors du service commercial, depuis le centre de dépôt de Pavillons-sous-Bois. [...] Le tramway finira par quitter la station Cosmonautes à 10 h 40. Pendant quarante minutes, jusqu'à 11 h 20, il circule sous haute surveillance policière : une dizaine de policiers et de CRS encadrent les Roms à l'intérieur des wagons, en plus de quatre employés de la RATP, tandis que neuf cars de CRS suivent le convoi sur l'ensemble du trajet. Enfin, à chaque arrêt, des policiers se tiennent sur les quais pour empêcher les Roms de sortir. Et ce, jusqu'à l'arrivée à Noisy-le-Sec, où les familles sont encore escortées jusque dans le RER E, en direction de Chelles ou de Tournan, selon un agent RATP. Où ces familles sont-elles allées ? Ont-elles quitté le train en cours de route ? Sont-elles retournées à Saint-Denis ? C'est ce que cherche à savoir l'association Médecins du monde, qui se dit "inquiète" de l'état de santé de ces populations. "Des familles nous ont appelés pour avoir des nouvelles de leurs enfants mineurs dont ils avaient été séparés, avant l'entrée dans le tram, assure Livia Otal, coordinatrice du programme Roms au sein de l'ONG. Cette façon de perdre les gens dans la nature pour les décourager de revenir est choquante." [...] "C'est clairement un dérapage, lâche Philippe Touzet, délégué central SUD-RATP. On est un service commercial, et non un service de transport pour les opérations de police. Sans compter que cela a rappelé à nombre d'agents les convois de déportation de juifs, depuis la gare de Bobigny, pendant la Seconde Guerre mondiale.""

jeudi 1 septembre 2011

Jour 1573

Toujours prêt à aider la Lybie

La beauté du commerce international français dans le Figaro, le 1er septembre 2011 :

"Les services de renseignement de Kadhafi ont été formés dans le plus grand secret par des cadres d'Amesys, une filiale de Bull, ainsi que par des militaires de la direction du renseignement militaire (DRM). L'information avait été dévoilée mardi par le Wall Street Journal . Le Figaro a retrouvé l'un des militaires chargés de cette formation. «Nous avons mis en route le système d'écoute libyen fin juillet 2008, explique-t-il, sous couvert d'anonymat. Les cadres de Bull étaient très attachés à cette mission qui avait été facturée environs 10 millions d'euros.» [...] La Libye fournissait alors un laboratoire intéressant puisqu'elle allait permettre à Bull de tester son système sans limite, sur un pays de plusieurs millions d'habitants. «Nous avons mis tout le pays sur écoute, explique notre interlocuteur. On faisait du massif: on interceptait toutes les données passant sur Internet: mails, chats, navigations Internet et conversation sur IP.» La Libye présentait également l'avantage d'être techniquement facile à placer sur écoute, puisque c'était un pays consommateur de contenus Internet, mais très faible producteur de contenus. «En se branchant sur l'interconnexion internationale, nous avions déjà 98% du trafic, il y avait très peu de points de captures.» Facebook, Twitter, Skype, Yahoo mail, Gmail… Rien n'échappait aux yeux de Tripoli.[...] Les militaires français et les cadres de Bull étaient notamment en relation directe avec Abdallah Senoussi, beau frère de Kadhafi et chef des services secrets libyens. L'homme est tristement célèbre pour avoir été condamné par contumace pour son implication dans l'attentat du vol 772 d'UTA dans lequel périrent en 170 personnes en 1989, abattues en vol par un missile. «C'est lui qui négociait les fonctionnalités du produit et qui nous donnait des directives», révèle notre interlocuteur."