Une santé bien assurée
L'Humanité, 25 juin 2009 :
"la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) compte renforcer le contrôle des arrêts maladie, dont plus de 10 % seraient injustifiés. Une « imposture », dénoncent de plus en plus de praticiens, dont la pratique les expose à être attaqués pour « délit statistique », alors qu’ils n’ont fait que leur travail. Parmi eux, le Dr Christian Lehmann [...] « Le but, c’est que les Français ne fassent plus confiance au système solidaire. Quand on parle de 13 % d’arrêts injustifiés, les gens sont interpellés. C’est une manière de culpabiliser les assurés et les médecins, et de les pousser vers le système assurantiel que veut imposer le gouvernement », analyse ce généraliste. Il n’hésite pas à rappeler que de 6 % d’arrêts injustifiés en 2004, on a bondi à presque 15 % avec l’arrivée de l’ex-patron des assurances Axa à la tête de l’Assurance maladie, « sans aucune justification ». Et aujourd’hui, en avançant qu’entre 11 % et 13 % des arrêts de travail seraient « injustifiés », le gouvernement continue dans sa logique de désinformation. Car ce que le gouvernement omet de dire, c’est que ces prétendus abus ne portent que sur 10 % des arrêts de travail déclarés. Ce qui signifie que les 90 % restants ne semblent pas soulever d’objections. Autrement dit, le taux de fraude oscillerait en réalité autour des 2 % ou 3 %, soit, environ 250 millions d’euros par an. Cette estimation est confirmée par Claude Frémont, ancien directeur de la Caisse d’assurance maladie de Nantes, qui rappelle que « cette annonce est tombée comme par hasard juste après l’annonce du député UMP Frédéric Lefebvre qui envisageait de faire travailler les salariés durant leur arrêt maladie ». « Aujourd’hui, quand on parle du déficit incommensurable de la Sécu, la seule réponse apportée par le gouvernement, c’est la traque aux arrêts de travail. Il faut dire qu’en baissant le taux des prescriptions d’antibiotiques, on a fait le tour de la question. C’est oublier que, ramené au budget du régime général, cela représente 3 % des prestations de l’assurance maladie. » Pour dénoncer cet amalgame, une cinquantaine de médecins ont lancé un « manifeste des délinquants statistiques ». Dans une pétition, ils déclarent « avoir arrêté des patients dont l’état de santé rendait le maintien au travail impossible ou dangereux pour leur santé » et assument faire « partie des médecins qui prescrivent plus d’arrêts de travail que la moyenne », ce qui les expose à des sanctions. Ils demandent, notamment, qu’un audit soit effectué sur les chiffres avancés par la Sécu. Comme le conclut Claude Frémont : « des arrêts de travail abusifs, il y en a certainement, mais pas le pourcentage qu’on nous annonce et ce n’est pas par la répression qu’on le réglera. » Qui plus est, surenchérit Christian Lehmann : « On ne se pose jamais la question du lien entre arrêt et pénibilité au travail. »
L'Humanité, 25 juin 2009 :
"la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) compte renforcer le contrôle des arrêts maladie, dont plus de 10 % seraient injustifiés. Une « imposture », dénoncent de plus en plus de praticiens, dont la pratique les expose à être attaqués pour « délit statistique », alors qu’ils n’ont fait que leur travail. Parmi eux, le Dr Christian Lehmann [...] « Le but, c’est que les Français ne fassent plus confiance au système solidaire. Quand on parle de 13 % d’arrêts injustifiés, les gens sont interpellés. C’est une manière de culpabiliser les assurés et les médecins, et de les pousser vers le système assurantiel que veut imposer le gouvernement », analyse ce généraliste. Il n’hésite pas à rappeler que de 6 % d’arrêts injustifiés en 2004, on a bondi à presque 15 % avec l’arrivée de l’ex-patron des assurances Axa à la tête de l’Assurance maladie, « sans aucune justification ». Et aujourd’hui, en avançant qu’entre 11 % et 13 % des arrêts de travail seraient « injustifiés », le gouvernement continue dans sa logique de désinformation. Car ce que le gouvernement omet de dire, c’est que ces prétendus abus ne portent que sur 10 % des arrêts de travail déclarés. Ce qui signifie que les 90 % restants ne semblent pas soulever d’objections. Autrement dit, le taux de fraude oscillerait en réalité autour des 2 % ou 3 %, soit, environ 250 millions d’euros par an. Cette estimation est confirmée par Claude Frémont, ancien directeur de la Caisse d’assurance maladie de Nantes, qui rappelle que « cette annonce est tombée comme par hasard juste après l’annonce du député UMP Frédéric Lefebvre qui envisageait de faire travailler les salariés durant leur arrêt maladie ». « Aujourd’hui, quand on parle du déficit incommensurable de la Sécu, la seule réponse apportée par le gouvernement, c’est la traque aux arrêts de travail. Il faut dire qu’en baissant le taux des prescriptions d’antibiotiques, on a fait le tour de la question. C’est oublier que, ramené au budget du régime général, cela représente 3 % des prestations de l’assurance maladie. » Pour dénoncer cet amalgame, une cinquantaine de médecins ont lancé un « manifeste des délinquants statistiques ». Dans une pétition, ils déclarent « avoir arrêté des patients dont l’état de santé rendait le maintien au travail impossible ou dangereux pour leur santé » et assument faire « partie des médecins qui prescrivent plus d’arrêts de travail que la moyenne », ce qui les expose à des sanctions. Ils demandent, notamment, qu’un audit soit effectué sur les chiffres avancés par la Sécu. Comme le conclut Claude Frémont : « des arrêts de travail abusifs, il y en a certainement, mais pas le pourcentage qu’on nous annonce et ce n’est pas par la répression qu’on le réglera. » Qui plus est, surenchérit Christian Lehmann : « On ne se pose jamais la question du lien entre arrêt et pénibilité au travail. »