Il ment encore (et toujours)
Libération, le 13 mai 2011 :
"Jean-François Copé a diffusé ces derniers jours un argumentaire en forme de comparatif des bilans de François Mitterrand et de Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Cette comparaison souvent baroque - qui fait abstraction sans aucune gêne des contextes économiques totalement différents - porte notamment sur l’évolution du taux de prélèvements obligatoires pendant les mandats respectifs des deux présidents de la République. François Mitterrand est ainsi accusé d’avoir fait progresser ces derniers de 2 points quand Nicolas Sarkozy peut s’enorgueillir, selon l’UMP, d’une «baisse de 1,3 point entre 2007 et 2010».
DESINTOX
La baisse du taux de prélèvements obligatoires (TPO) a toujours été une marotte de campagne de Nicolas Sarkozy. Quitte à parler de bilan, l’UMP aurait pu d’ailleurs rappeler que le candidat Sarkozy s’était engagé à faire baisser ce taux (qui traduit le rapport des impôts et des cotisations sociales sur le produit intérieur brut) de 4 points en dix ans. On ne peut pas dire qu’on en prend le chemin. En 2007, le taux de prélèvements obligatoires était de 43,3 % du PIB. Il est tombé à 42,8 % en 2008, et à 41,6 % du PIB en 2009 avant de remonter à 42,2 % en 2010. La baisse est donc de 1,1 point, un peu inférieure à ce qu’avance l’UMP dans son tract.
Mais ce n’est pas l’essentiel. Le vrai problème est que le Président, comme le gouvernement, n’a que peu de raison de s’en vanter : la baisse du taux de prélèvements obligatoire sur la période est majoritairement imputable à la crise financière, qui a plombé les recettes fiscales françaises. Prenons l’exemple de 2009, année où la baisse a été historique (-1,2 point).
Ce plongeon s’explique marginalement par certaines mesures politiques (baisse de la TVA sur la restauration, entrée en vigueur de la loi Tepa), mais surtout par la violente contraction des recettes fiscales, notamment au titre de l’impôt sur les sociétés (21 milliards seulement perçus contre près de 50 milliards en 2008) du fait des résultats dégradés des entreprises et des mesures d’urgence prises pour soulager leur trésorerie.
D’autres mesures du plan de relance sont aussi venues tirer le TPO vers le bas. Ainsi, la suppression - pour une année - des deux tiers provisionnels au titre de l’impôt sur le revenu. En clair, la baisse a surtout été conjoncturelle. La preuve en est que, logiquement, l’effet s’est inversé depuis 2010 avec la fin de la crise et le semblant de reprise économique : les recettes fiscales revenant, le TPO remonte mécaniquement. De 41,6 en 2009, il est passé à 42,2 % en 2010 (les recettes au titre de l’impôt sur les sociétés ont cette année-là progressé de 13 milliards d’euros). Selon les projections de Bercy, le TPO dépassera les 43 % en 2011 (43,1 %). Il sera alors presque au niveau de 2007.
Et ce n’est pas fini. Le programme de stabilité 2011-2014, envoyé à Bruxelles, est riche d’enseignements sur cette question. Ce document, qui fait office de feuille de route des finances publiques, indique que la hausse se poursuivra jusqu’à 2014. Dès 2012, le TPO devrait ainsi s’établir à 43,4 %, soit un niveau plus haut qu’en 2007. Par la suite, peut-on lire, «le taux de prélèvements obligatoires continuerait à augmenter jusqu’en 2013 et se stabiliserait ensuite en 2014, s’établissant à 43,9 % du PIB». Les deux causes principales sont «la poursuite du rattrapage spontané des recettes en sortie de crise», mais aussi des mesures nouvelles, essentiellement les «réductions de dépenses fiscales et de niches sociales programmées sur la période». Des hausses d’impôts qui ne disent pas leur nom. Il est loin, le temps de la baisse des prélèvements obligatoires."
Libération, le 13 mai 2011 :
"Jean-François Copé a diffusé ces derniers jours un argumentaire en forme de comparatif des bilans de François Mitterrand et de Nicolas Sarkozy à l’Elysée. Cette comparaison souvent baroque - qui fait abstraction sans aucune gêne des contextes économiques totalement différents - porte notamment sur l’évolution du taux de prélèvements obligatoires pendant les mandats respectifs des deux présidents de la République. François Mitterrand est ainsi accusé d’avoir fait progresser ces derniers de 2 points quand Nicolas Sarkozy peut s’enorgueillir, selon l’UMP, d’une «baisse de 1,3 point entre 2007 et 2010».
DESINTOX
La baisse du taux de prélèvements obligatoires (TPO) a toujours été une marotte de campagne de Nicolas Sarkozy. Quitte à parler de bilan, l’UMP aurait pu d’ailleurs rappeler que le candidat Sarkozy s’était engagé à faire baisser ce taux (qui traduit le rapport des impôts et des cotisations sociales sur le produit intérieur brut) de 4 points en dix ans. On ne peut pas dire qu’on en prend le chemin. En 2007, le taux de prélèvements obligatoires était de 43,3 % du PIB. Il est tombé à 42,8 % en 2008, et à 41,6 % du PIB en 2009 avant de remonter à 42,2 % en 2010. La baisse est donc de 1,1 point, un peu inférieure à ce qu’avance l’UMP dans son tract.
Mais ce n’est pas l’essentiel. Le vrai problème est que le Président, comme le gouvernement, n’a que peu de raison de s’en vanter : la baisse du taux de prélèvements obligatoire sur la période est majoritairement imputable à la crise financière, qui a plombé les recettes fiscales françaises. Prenons l’exemple de 2009, année où la baisse a été historique (-1,2 point).
Ce plongeon s’explique marginalement par certaines mesures politiques (baisse de la TVA sur la restauration, entrée en vigueur de la loi Tepa), mais surtout par la violente contraction des recettes fiscales, notamment au titre de l’impôt sur les sociétés (21 milliards seulement perçus contre près de 50 milliards en 2008) du fait des résultats dégradés des entreprises et des mesures d’urgence prises pour soulager leur trésorerie.
D’autres mesures du plan de relance sont aussi venues tirer le TPO vers le bas. Ainsi, la suppression - pour une année - des deux tiers provisionnels au titre de l’impôt sur le revenu. En clair, la baisse a surtout été conjoncturelle. La preuve en est que, logiquement, l’effet s’est inversé depuis 2010 avec la fin de la crise et le semblant de reprise économique : les recettes fiscales revenant, le TPO remonte mécaniquement. De 41,6 en 2009, il est passé à 42,2 % en 2010 (les recettes au titre de l’impôt sur les sociétés ont cette année-là progressé de 13 milliards d’euros). Selon les projections de Bercy, le TPO dépassera les 43 % en 2011 (43,1 %). Il sera alors presque au niveau de 2007.
Et ce n’est pas fini. Le programme de stabilité 2011-2014, envoyé à Bruxelles, est riche d’enseignements sur cette question. Ce document, qui fait office de feuille de route des finances publiques, indique que la hausse se poursuivra jusqu’à 2014. Dès 2012, le TPO devrait ainsi s’établir à 43,4 %, soit un niveau plus haut qu’en 2007. Par la suite, peut-on lire, «le taux de prélèvements obligatoires continuerait à augmenter jusqu’en 2013 et se stabiliserait ensuite en 2014, s’établissant à 43,9 % du PIB». Les deux causes principales sont «la poursuite du rattrapage spontané des recettes en sortie de crise», mais aussi des mesures nouvelles, essentiellement les «réductions de dépenses fiscales et de niches sociales programmées sur la période». Des hausses d’impôts qui ne disent pas leur nom. Il est loin, le temps de la baisse des prélèvements obligatoires."