Un collectif pour faire une petite différence (?)
"La conseillère de l'agence Pôle-Emploi de la place Occitane à Toulouse, Isabelle de Léon n'applique pas ce que la nouvelle procédure, née de la fusion Anpe/Assedic, lui impose de faire.
Elle est, de ce fait, déjà punie d'un blâme par sa direction régionale. Et est convoquée devant un conseil de discipline à Paris le 13 octobre. Mais rien ne semble pouvoir y faire:
«Je revendique mon acte de désobéissance», insiste-t-elle, refusant «la dégradation du service apporté aux demandeurs d'emploi». Dégradation qui s'étendrait selon elle à «tous les secteurs des services publics», Santé, Éducation, Social, Énergie...
Isabelle de Léon dénonce pour l'heure le «désengagement de l'intérêt général au profit d'intérêts particuliers». Et démarre derechef une grève de la faim comme «une alerte, un cri d'alarme».
Les temps sociaux et politiques ne sont plus à la demi-mesure. Le mouvement syndical qui a entendu cette alerte soutient ainsi cet appel de Toulouse des Résistants et Désobéisseurs des Services Publics:
L'appel : «Nous sommes citoyens, usagers et salariés, agents ou fonctionnaires, des services publics ou remplissant des missions de service public. Nous nous élevons ensemble contre leur destruction et la dégradation du service rendu au public. Ce gouvernement fusionne, démantèle, privatise. Il manipule ! Il organise l’inefficience des services et les rends inopérants pour remplir leur mission d’intérêt général. Il réduit les effectifs, diminue les moyens, change les métiers, réorganise, désorganise... provocant ainsi l’insatisfaction, la souffrance des usagers et des salariés. En diffusant une mauvaise image des services publics et en opposant usagers et agents, il prépare leur disparation.
Les services publics sont : la Santé, l’Éducation, la Justice, les Services Sociaux, les Universités et la Recherche, les Organismes Sociaux : CAF, Sécurité Sociale, Pôle emploi.., la Police, les pompiers, les crèches municipales, les services territoriaux, l’Équipement et l’aménagement du territoire, les transports, la Poste, la SNCF…, l’accès à l’eau, au gaz, à l’électricité…
Tout ce qui est légitimement accessible à tous et qui rend notre quotidien confortable. Nous avons déjà laissé beaucoup de ces secteurs échapper à la régulation de l’État, certains ont disparu, d’autres sont privatisés ou en voie de l’être... Jusqu’où allons-nous les laisser nous dépouiller de ce qui ne leur appartient pas ?
Les générations précédentes avaient eu la prudence de garantir un accès gratuit et régulé à ces services de façon à ce que tous puissent en bénéficier, sur l’ensemble du territoire. De quel droit ce gouvernement s’autorise t-il à modifier des structures aussi fondamentales - et constitutionnelles - de notre société, à l’encontre des intérêts de la population qu’il est censé servir ?
Il agit peut-être légalement, en votant des lois de circonstance, mais illégitimement en ne prenant en compte ni l’intérêt de tous, ni les importantes manifestations de la rue, et en instrumentalisant l’action sociale à des fins sécuritaires.
Il y a un dysfonctionnement dans notre système déclaré «démocratique»; et devant ce constat beaucoup d’entre nous se sont démobilisés, invoquant une impuissance face aux politiques, eux-mêmes confrontés à leur propre impuissance face aux marchés... D’impuissance en impuissance : nous laissons faire et ce que nous redoutons se réalise.
Pourtant, nous pouvons cesser de nous abriter derrière ce discours de «ça ne sert à rien», arrêter d’être fatalistes, retrouver notre capacité à nous indigner, à réagir, et à agir. Car sans nous «ils ne sont rien», qu’ils soient politiques, ou grands gestionnaires, c’est nous qui sommes sur le terrain à faire ou à
subir ce qu’ils nous demandent d’accomplir contre nous mêmes tous les jours.
Il est donc temps, pour nous et pour les générations à venir :
• de porter un coup d’arrêt à la destruction organisée de nos droits et acquis sociaux, de nos structures de solidarité et de fraternité ;
• d’arrêter de subir et de contribuer au fonctionnement de ce qui peut nous nuire ou nuire à nos concitoyens ;
• de refuser de céder à la division (les vieux contre les jeunes, les travailleurs contre les chômeurs, les salariés du privé contre les fonctionnaires, les «intégrés» contre les étrangers...), à la mise en concurrence généralisée des salariés au cœur des entre- prises et des établissements publics (Les places sur le marché de l’emploi sont chères et ils s’en servent...)
Il dépend de nous, une fois encore dans l’histoire, de leur rappeler qu’ils ne sont là que sur mandat, et qu’ils sont révocables... Ils nous demandent des sacrifices, exigeons des comptes...
Il s’agit d’un appel, un appel à la résistance, à la désobéissance ouverte ou discrète, où que vous soyez, qui que vous soyez, vous pouvez agir pour vous et pour nous tous. Dans chaque secteur d’activité, chaque jour, nous pouvons faire différemment ou ne pas faire, pour arrêter cette déconstruction et la contrer le plus possible.
C’est un appel à Tous. Nous demandons à chacun d’agir à sa mesure, nous appelons aussi les personnalités à s’engager publiquement, médiatiquement : que ceux qui savent, disent, haut et fort, seuls ou en collectifs : historiens, sociologues, juristes, économistes, intellectuels, journalistes...
Retrouvons le sens de nos responsabilités : celles de citoyens actifs, celles de membres solidaires d’une collectivité, celles de parents soucieux de l’avenir de leurs enfants. »
Résistants et désobéisseurs des Services Publics"