Quand la presse joue les putains du pouvoir
Télérama, le 29 novembre 2011 :
"C’est un arrêté discret du ministère de l’Intérieur, daté du 21 novembre 2011 et publié au Journal officiel. Claude Guéant y désigne – ou plutôt, y reconduit – les membres du groupe de travail sur l’amélioration du contrôle et de l’organisation des bases de données de la police. [...] ’on y retrouve également quatre « personnalités qualifiées désignées par le ministre de l’Intérieur »[...] Et puis il y a Jean-Marc Leclerc, journaliste au Figaro, dont la présence intrigue. [...] Grand reporter, spécialiste des sujets policiers, Leclerc s’était fait attraper par la patrouille Bakchich en décembre 2008. A l’époque, il avait publié en exclusivité – et pour cause – le rapport du groupe de travail dont il était déjà membre. Surtout, il avait oublié d'y ajouter un disclaimer, cette pratique censée renseigner le lecteur sur l’endroit d’où on parle. [...] le journaliste intégré a suivi « son » ministre, qu’on oserait qualifier de tutelle. En 2011, il a relayé son agenda, qu’il s’agisse de l’affaire Neyret ou des demandeurs d’asile portés sur la fraude. Pas un mot, en revanche, sur les écoutes de journalistes, sauf pour dédouaner le patron de la DCRI, Bernard Squarcini. Plus efficace qu’un service de presse, le rubricard a même couvert les soucis de santé du locataire de la place Beauvau, pour mieux annoncer son retour aux affaires. Avant de lui offrir une tribune pour décapiter le projet sécurité du Parti socialiste. En résumé, une histoire d’amour à plusieurs milliers d'occurrences sur Google. C’est ce qu’on appelle un suivi longitudinal. [...] le journaliste intégré a suivi « son » ministre, qu’on oserait qualifier de tutelle. En 2011, il a relayé son agenda, qu’il s’agisse de l’affaire Neyret ou des demandeurs d’asile portés sur la fraude. Pas un mot, en revanche, sur les écoutes de journalistes, sauf pour dédouaner le patron de la DCRI, Bernard Squarcini. Plus efficace qu’un service de presse, le rubricard a même couvert les soucis de santé du locataire de la place Beauvau, pour mieux annoncer son retour aux affaires. Avant de lui offrir une tribune pour décapiter le projet sécurité du Parti socialiste. En résumé, une histoire d’amour à plusieurs milliers d'occurrences sur Google. C’est ce qu’on appelle un suivi longitudinal. [...] Un rapport prouve l’inefficacité relative de la vidéosurveillance, rappelant que « l’impact moyen sur le taux d’élucidation des crimes et délits reste globalement faible en zone de police » ? Qu’à cela ne tienne, le journaliste du Figaro le publie en exclusivité, tout en isolant les conclusions les plus favorables. Et titre : « La vidéosurveillance fait chuter la délinquance de rue ». [...] dans des situations analogues, où on ne sait plus vraiment qui tient la plume, certains ont choisi de franchir le Rubicon. C’est le cas de Gérard Gachet. Directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles, il est devenu porte-parole de la place Beauvau en décembre 2007."
Bref
"The basis of our government being the opinion of the people, the very first object should be to keep that right; and were it left to me to decide whether we should have a government without newspapers, or newspapers without a government, I should not hesitate a moment to prefer the latter."
Thomas Jefferson Letter to Colonel Edward Carrington (16 January 1787)
Avec des journaux comme le Figaro on ne s'étonne pas d'avoir certains hommes politiques.