vendredi 5 décembre 2008

Jour 576

La politique du chiffre

Libération, le 3 décembre 2008 :

"La commission Varinard, chargée de formuler des propositions pour réformer l'ordonnance du 2 février 1945 sur l'enfance délinquante, a rendu ses conclusions en début d'après-midi. [...] Lundi matin, sur Europe 1, le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre, interrogé sur l'opportunité d'avancer à 12 ans l'âge de la détention, affirmait ainsi: "Vous savez, en 1945, il y a avait un mineur sur 166 mis en cause dans une affaire pénale. Il y en a un sur trente aujourd'hui. Il faut réagir". [...] En 2007, il y avait 204.000 mineurs mis en cause en France, ce qui représente entre 1 sur 20 et 1 sur 30 de la population des 13-18 ans (et non de la population totale des mineurs comme le dit Lefebvre). Mais de toute manière, les chiffres peuvent être vrais... et ne rien vouloir dire. [...] Sur les 203699 mineurs mis en causes (ce qui ne veut pas dire condamnés) par les service police et de gendarmerie en 2007, "l'ensemble des faits susceptibles d'être qualifiés de criminels (homicides, viols, vols à main armée, prise d'otage, trafics de drogue) ne représentent que 1,3% du total". [...] l'augmentation de la délinquance des mineurs, grande marotte de la droite. Celle-ci augmente effectivement, écrit-il. Mais pas plus, ni plus vite, que la délinquance globale depuis trente ans. C'est même l'inverse, puisque la part des mineurs dans le nombre total de mises en cause baisse nettement depuis dix ans, passant de 22% en 1998, à 18% en 2007. Les statistiques de la justice confirment ces chiffres. Mucchielli a comparé la répartition par classe d'âge des condamnations en 1989 et 2006. Le résultat est une stabilité quasi parfaite de la proportion des condamnés mineurs, que ce soit les moins de 13 ans, les 13-16 ans ou les 16-18 ans. Ironiquement, la seule augmentation, en proportion, concerne la classe d'âge des 40-60 ans."