A part égales
Observatoire des inégalités, le 18 décembre 2008 :
"Tout un symbole. C’est dans les murs de la prestigieuse Ecole Polytechnique, que le Président de la République s’est attaché à vanter les mérites du principe d’égalité des chances, en rappelant notamment, porté par un lyrisme appliqué, à quel point ce principe est consubstantiel à l’idéal républicain [...] Pour autant, la démarche soulève des réserves. L’arsenal des mesures proposées confirme tout d’abord que l’on ne sait décidément penser l’égalité des chances que dans le cadre d’une politique centrée sur les plus démunis. Il faut s’en préoccuper, c’est une évidence. Mais une politique de justice sociale doit concerner le pays tout entier et pas seulement quelques individus appartenant aux catégories les plus défavorisées. Car que leur propose-t-on au fond ? De les intégrer à une société qui reste, dans ses rapports sociaux d’ensemble, foncièrement injuste. Ces mesures visent à améliorer des situations individuelles, et non pas la situation en général. Elles visent à donner plus d’opportunités à quelques-uns, tout en renonçant à se préoccuper des autres. C’est la même logique que celle qui avait conduit à la suppression de la carte scolaire. [...] On reste ici prisonnier d’un schéma intellectuel restrictif : il ne suffit pas de s’assurer que les classes préparatoires de France et de Navarre comptent bien leur 30% de boursiers pour changer fondamentalement la donne. On changera celle-ci lorsque l’on aura donné à l’ensemble des jeunes, en France, et notamment à ceux qui appartiennent aux véritables classes moyennes, une chance d’accéder à des études supérieures de qualité. Or, de ce point de vue, le "plan réussir en licence" de Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur, n’y suffira pas. La réforme des lycées qui est envisagée n’y contribuera pas non plus, la compression des postes et les suppressions de Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) pas davantage. Les universités françaises accueillent actuellement 1 300 000 étudiants. Quatre fois plus qu’en 1960 et 20 fois plus qu’en 1930. Le paradoxe veut qu’ils ne pèsent proportionnellement guère lourd face aux 220 000 étudiants se formant dans des Ecoles, dont 70 000 dans des classes préparatoires [2]. C’est à l’aune de tels rapports qu’il faut mesurer la limite des ambitions qui viennent d’être affichées en matière de justice sociale et d’égalité des chances. L’élitisme, même lorsqu’on le pare du beau nom de République, reste un élitisme. Et l’élite, ce n’est pas la France."
Observatoire des inégalités, le 18 décembre 2008 :
"Tout un symbole. C’est dans les murs de la prestigieuse Ecole Polytechnique, que le Président de la République s’est attaché à vanter les mérites du principe d’égalité des chances, en rappelant notamment, porté par un lyrisme appliqué, à quel point ce principe est consubstantiel à l’idéal républicain [...] Pour autant, la démarche soulève des réserves. L’arsenal des mesures proposées confirme tout d’abord que l’on ne sait décidément penser l’égalité des chances que dans le cadre d’une politique centrée sur les plus démunis. Il faut s’en préoccuper, c’est une évidence. Mais une politique de justice sociale doit concerner le pays tout entier et pas seulement quelques individus appartenant aux catégories les plus défavorisées. Car que leur propose-t-on au fond ? De les intégrer à une société qui reste, dans ses rapports sociaux d’ensemble, foncièrement injuste. Ces mesures visent à améliorer des situations individuelles, et non pas la situation en général. Elles visent à donner plus d’opportunités à quelques-uns, tout en renonçant à se préoccuper des autres. C’est la même logique que celle qui avait conduit à la suppression de la carte scolaire. [...] On reste ici prisonnier d’un schéma intellectuel restrictif : il ne suffit pas de s’assurer que les classes préparatoires de France et de Navarre comptent bien leur 30% de boursiers pour changer fondamentalement la donne. On changera celle-ci lorsque l’on aura donné à l’ensemble des jeunes, en France, et notamment à ceux qui appartiennent aux véritables classes moyennes, une chance d’accéder à des études supérieures de qualité. Or, de ce point de vue, le "plan réussir en licence" de Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur, n’y suffira pas. La réforme des lycées qui est envisagée n’y contribuera pas non plus, la compression des postes et les suppressions de Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) pas davantage. Les universités françaises accueillent actuellement 1 300 000 étudiants. Quatre fois plus qu’en 1960 et 20 fois plus qu’en 1930. Le paradoxe veut qu’ils ne pèsent proportionnellement guère lourd face aux 220 000 étudiants se formant dans des Ecoles, dont 70 000 dans des classes préparatoires [2]. C’est à l’aune de tels rapports qu’il faut mesurer la limite des ambitions qui viennent d’être affichées en matière de justice sociale et d’égalité des chances. L’élitisme, même lorsqu’on le pare du beau nom de République, reste un élitisme. Et l’élite, ce n’est pas la France."